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mardi 30 juillet 2013

Lettre ouverte du Comité pour la défense de l'Université

Depuis le printemps 2013, un groupe d'étudiant.e.s de Lyon 3, notamment issu.e.s de la fac de philosophie de cette université, s'est regroupé en un comité de défense de l'Université.
En juin 2013, lors du vote de la loi Fioraso, ils.elles écrivent aux sénateurs, pour dénoncer les dangers que cette dernière fait peser sur l'Université. Dans cette lettre ouverte, sont amenées au débat des questions de fond. Le comité pour la défense de l'Université, né à Lyon 3, constitue ainsi l'une des multiples voix du dissensus.
Le CREA'tif, une autre de ces modestes et persistantes voix du dissensus, est par conséquent ravi de lui ouvrir ses colonnes, et souhaite à tou.te.s une rentrée riche en rencontres et en actions.
Car ce n'est pas parce que la réforme Pécresse, puis Fioraso, sont passées, que la lutte est terminée.
Au contraire, elle ne fait que re-commencer...
Le comité pour la défense de l'université a d'ailleurs, de son côté, plein de projets pour cette rentrée.

Je crois qu'il est même en train d'attirer quelques étudiant.e.s de Lyon 2...et peut-être vice-versa ?
Il a également comme projet proche la création d'un lieu autonome sur internet pour vous parler de ces projets et vous les montrer. Mais on vous en reparlera ici un peu plus tard.

A Lyon 3, il n'y a pas que le GUD, qu'on se le tienne pour dit !
 
Vous souhaitant, en attendant la suite - prometteuse - bonne lecture de leur courrier,
 
Le CREA'tif et toute sa compagnie.
 
 
 
À Lyon, le Lundi 17 juin 2013

Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur,

En réaction au projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche (ESR), des étudiants de philosophie de l’université Jean Moulin Lyon 3 se sont réunis il y a quelques mois pour créer un Comité pour la défense de l’Université. C’est en ce nom que nous nous adressons à vous.

Cette nouvelle loi va bientôt passer sous votre jugement, c’est donc à vous que s’adressent nos derniers espoirs pour refuser une politique universitaire absurde et imposée de manière autoritaire depuis quelques années.

Si notre premier choc vis-à-vis de cette loi est bien le total décalage qu’il existe entre la vision qu’elle promeut (une université au service du marché, un savoir rentable, une formation professionnalisante) et ce qui nous anime en tant qu’étudiants de philosophie (le développement intellectuel, la compréhension du monde, des cultures, des hommes, le travail de la Raison), nous n’allons pas pour autant parler ici de notre filière : la gravité de cette loi concerne bien l’ensemble du système universitaire, et ainsi la société tout entière dans sa dynamique.

La loi Fioraso et son processus de mise en place est avant tout un scandale pour une démocratie. La France connait aujourd’hui une forte et dangereuse montée de haine, d’homophobie et de racisme, et, au lieu de tenter de calmer ce climat insupportable, le gouvernement profite du vacarme médiatique pour progressivement mettre en place dans le silence une loi totalement contraire aux aspirations des acteurs concernés.

Rappelons l’opposition farouche du Parti Socialiste contre la loi sur les Libertés et Responsabilités des Universités (LRU), la promesse de campagne visant à mettre fin à l’autoritarisme de la politique universitaire sous Nicolas Sarkozy, en réformant l’enseignement supérieur tout en étant à l’écoute de ses acteurs.

Ainsi sommes-nous stupéfaits de voir des assises régionales ignorées par le projet de loi, lequel est entièrement constitué par des assises nationales faisant la part belle aux experts des ministères. En résulte une loi constituée par le haut, bafouant le processus démocratique qui vise à faire émerger les lois par le bas.

De toute évidence, l’écoute des revendications universitaires aurait impliqué de revenir sur toutes les dérives de la loi LRU et il n’est donc pas étonnant, au regard du projet de loi, que l’autoritarisme soit encore de mise : aucun des aspects critiqués de la loi LRU n’est vraiment remis en cause ; pire, les intentions sont les mêmes et la loi en approfondit le système.

Après un long mutisme au sujet de ce projet de loi, les médias se focalisent à dessein sur la question de l’anglais. Les partis de droite utilisent ce prétexte pour descendre une loi émanant d’un gouvernement de gauche, alors même que cette loi ne répond aucunement à des valeurs de gauche.

Il est important de sauvegarder notre culture, certes, mais c’est avant tout en la protégeant de la marchandisation excessive de notre système économique envahissant que nous y parviendrons.

Enfin, ce qui fait de ce projet un scandale pour la démocratie, outre le travail autoritaire de formation de cette loi et sa communication médiatique voilée, c’est aussi cette vilaine habitude qu’ont les gouvernements successifs de faire voter une loi au moment de l’année où les acteurs concernés sont le moins disponible.

Ainsi, Madame la Ministre de l’ESR a-t-elle tenu à précipiter les débats à l’Assemblée nationale pour que ceux-ci puissent tenir l’espace des mois de mai et juin, espérant parvenir à un vote final durant l’été, moment le plus tactique pour ne pas avoir à craindre une contestation issue du milieu universitaire.

Nous rejetons ces habitudes, ces « stratégies de gouvernement », qui sont honteuses pour une démocratie, et nous vous demandons, par respect envers votre idéal républicain, de ne pas accepter cette loi.

Dans la continuité de la loi LRU, la nouvelle loi relative à l’ESR promeut l’autonomie des universités. Or, nous sommes loin d’être les premiers à souligner que, faute de moyens adéquats, l’autonomie des universités ne peut se réaliser sans s’en remettre aux financements privés.

Instaurée par la LRU, cette « autonomie » factice est largement perçue comme un traumatisme pour l’Université puisqu’elle a causé, entre autres choses, un déséquilibre budgétaire et une dépendance vis-à-vis du secteur privé.

Cette volonté de rendre « autonome » financièrement les universités ne fait que remettre en cause l’autonomie pédagogique en les mettant en concurrence, ce qui leur demande un effort qui n’a rien à voir avec la nature propre de l’Université.

Corrélativement, la place croissante accordée aux représentants d’organismes privés au sein des conseils d’administration des universités (ceux-ci pourront d’ailleurs élire le président avec cette nouvelle loi) suppose une quête de rentabilité jusqu’à rendre cette dernière normale.

Bien loin d’être constituée de mesures nécessaires et absolument réalistes, cette loi révèle un esprit idéologique très prégnant, à l’œuvre dans la politique universitaire depuis le processus de Bologne et incarné de manière flamboyante avec la loi LRU : le pragmatisme économique et son aplatissement institutionnel conséquent.
Dans cet esprit, toutes les entités individuelles ou collectives doivent être organisées pour accroître la santé économique de la société, et l’Université ne peut y échapper.

La déclaration d’intention de Madame la Ministre Geneviève Fioraso selon laquelle « l’université doit être une arme anti-crise » (édito du premier projet de loi) en est une parfaite illustration : subséquemment, l’Université devrait alors devenir une entreprise et le savoir sa marchandise.

Ce regard d’ensemble est le fruit de notre analyse de certaines mesures de la loi. Mais parce que nous avons la prétention de rendre notre critique de la loi Fioraso efficiente, il nous semble indispensable de développer en précision certains points, ceci hélas de manière non exhaustive compte tenu du format dans lequel nous nous adressons à vous.

Tout d’abord, au niveau institutionnel, la loi veut inciter à la constitution de grands pôles de compétitivité régionaux, au sein desquels devraient se regrouper toutes les universités (et autres établissements d’enseignement supérieur) en association avec diverses institutions et entreprises du monde socio-économique.

La loi LRU avait déjà eu des effets institutionnels désastreux pour les universitaires : pouvoirs des conseils centraux des universités augmentés, prééminence du président d’université, hiérarchie rigidifiée.

Avec cette nouvelle mesure, l’institution universitaire s’oriente inexorablement vers une gouvernance technocratique et financière régionale, accentuant leur écart avec la source, le point de départ de l’Université (les campus, les enseignants, les étudiants, le personnel) et intensifiant la compétition à l’échelle régionale.

La démocratie universitaire et l’égalité territoriale au sein de la nation, deux grands idéaux communs entre l’Université et l’Etat républicain, seront mis à mort, ce qui impliquera sans aucun doute un divorce majeur entre ces deux institutions.

À cela s’ajoute la modification de l’article L. 613-1 du code de l’éducation, entrainant la réduction du nombre de diplômes et la mainmise sur le contenu des formations.
En remplaçant l’habilitation par l’accréditation, l’État, en plus de mettre les jeunes diplômés en concurrence à leur entrée dans le monde du travail en fonction de la provenance de leur diplôme, sape toute autonomie des universités dans le choix de leur offre d’enseignement.
Les modalités de l’accréditation prenant en compte « les objectifs d’insertion professionnelle et les liens entre les équipes pédagogiques et les représentants des professions concernées par la formation » obligent directement les universités à se construire selon l’objectif de l’insertion professionnelle tout en tenant compte des intérêts et des besoins du marché de l’emploi.

Ainsi les filières « utiles » seront-elles valorisées mais seulement dans le sens de la production économique.
Et qu’advient-il alors des filières de la culture et de l’art ?

Ou bien les universités accepteront d’en faire des enseignements complémentaires -et donc secondaires- à ceux de la médecine ou du droit par exemple, se conformant ainsi aux normes des modalités leur permettant l’accréditation.

Ou bien elles refuseront le sacrifice des filières qui encouragent la pensée critique -qui a la faiblesse de ne pas être efficiente immédiatement- en refusant « la liste des mentions des diplômes nationaux regroupés par grands domaines ainsi que les règles relatives à l’organisation des formations ».

Mais en cas de refus, ces universités ne pourront tout simplement plus délivrer de diplômes, car elles ne seront plus accréditées. Nous en sommes donc bien là : l’autonomie de financement et de gestion de l’Université est un leurre puisqu’elle s’accompagne, et cela en toute logique, d’un balayage de l’autonomie pédagogique.

Les mesures qui touchent l’enseignement sont révélatrices de l’esprit pragmatiste et économiste de cette loi. L’article 17 s’applique à faire du parcours scolaire de l’étudiant un véritable sas vers l’emploi avant même son entrée dans le supérieur, réduisant ainsi la qualité et l’accès à l’enseignement.

Il encourage en effet la continuité entre le lycée et l’enseignement supérieur pour une « spécialisation progressive des études » ; ainsi le choix d’orientation des élèves se fait dès la troisième, ce qui risque de produire un couloir lycée/université trop étanche et donc à caractère exclusif.

En conséquence de quoi, les personnes s’écartant du profil type, arrivant d’horizons atypiques, verront leur accès à la faculté largement mis à mal.

De plus la pluridisciplinarité promue concernant le contenu d’enseignement des licences, en tant qu’association de disciplines concourant à une réalisation commune mais sans qu’aucune discipline n’interagisse sur la vision et la méthodologie des autres, entraine nécessairement un morcellement de l’objet d’études, et donc à une connaissance fractionnée, vidée de l’exhaustivité qu’elle cherche vainement mais idéalement à atteindre lorsque les cours donnés en licences tentent de balayer un panorama propre à une discipline.

La spécialisation progressive, elle, parachève la fracture entre les disciplines, n’offrant aux étudiants qu’un cumul de connaissances hétérogènes et superficielles en raison du peu de temps accordé à chacune d’elle.

À la sortie du sas, les diplômés seront experts mais aveugles et sourds aux domaines qui avoisinent les leurs.

Les interactions entre connaissances et disciplines se feront plus laborieuses, puisque les experts, pris au piège de la concurrence, chercheront le triomphe de leur discipline plutôt que le progrès de la science pour elle-même.

La pluridisciplinarité est une tentative d’interdisciplinarité bâclée, qui relie artificiellement des savoir-faire internes sans vraiment s’ouvrir et se nourrir des connaissances qui l’entourent.

C’est d’interdisciplinarité dont l’enseignement à besoin en ce sens que la fécondité du mélange des disciplines réside dans le travail commun, où l’on est moins « expert de » qu’en demande de la connaissance de l’autre.

L’article 17 prohibe l’immersion totale dans un domaine particulier, la voie qu’il emprunte n’est plus de l’ordre du choix mais de l’obligation. Le souhait d’interdisciplinarité peut pourtant trouver satisfaction dans la décision autonome de s’inscrire en double licence, ce qui permet à l’étudiant de suivre des enseignements complets que lui seul s’intéresse à relier.

Loin de combler les attentes des étudiants, cette mesure veut surtout permettre l’organisation des enseignements en fonction des demandes du monde socio-économique, dont les postes attendront sagement les étudiants à la sortie de l’entonnoir de la « spécialisation progressive ».

La recherche n’échappe pas à la logique de marchandisation du savoir ; en témoigne l’alinéa ajouté à l’article 7 qui impose à la recherches dans les domaines scientifiques un « transfert des résultats obtenus vers les secteurs socio-économiques ».

À ce sujet, les articles 10 et 10 bis sont ambiguës. Une marchandisation des résultats de la recherche aux services de la technique et donc de l’industrie se dessine en filigrane. Seulement, la diffusion de la culture scientifique et de la culture technique doit garder son importance et son efficience.

La culture technique est un réel moyen d’émancipation envers les objets techniques. Elle permet de mieux comprendre et donc de mieux utiliser les technologies avec lesquelles nous vivons.
Le paradoxe de Beaune est là, pressant, inquiétant : alors que jamais notre civilisation n’a poussé aussi loin sa puissance technique, elle ignore presque complètement la « culture technique », c’est-à-dire le savoir et les retombées sociales des techniques.

Or, soumettre la recherche aux besoins économiques de la société, c’est chercher à accroitre la productivité, c’est pousser à la consommation, c’est transformer la recherche en chaine de fast-food de technologies éphémères, mais ce n’est pas démocratiser le savoir scientifique et technique.

L’Université se doit de diffuser sa recherche, mais le but doit être culturel et intellectuel pour être émancipateur ; en aucun cas la diffusion de la recherche doit servir à accroître l’efficacité et la productivité des acteurs institutionnels du monde économique (car il va sans dire que c’est dans le monde économique que se recruteront les potentiels investisseurs intéressés de la recherche).

La loi, en voulant faciliter le transfert des résultats de la recherche dans le monde socio-économique, mais aussi en soumettant la recherche universitaire à des programmes transnationaux (Horizon 2020) très éloignés de sa réalité et en perpétuant son évaluation externe (Haut conseil de l’évaluation), achève l’asservissement de l’Université à la conjoncture et aux intérêts utilitaires et immédiats.

En somme, ce qui résulte de cette loi est en inadéquation avec l’idéal que nous revendiquons. Cet idéal n’est pas un argument de dernier recours ; c’est un idéal à valeur normative, qui tient à promouvoir une réalité autre que celle du triste réalisme pragmatique de la philosophie libérale qui nous a conduit à la situation actuelle. Cet idéal doit être ce que l’éducation et la recherche se fixent comme finalité.

On aime en effet vanter l’Université française comme lieu où se concentre et se forge le savoir ; c’est elle qui le fait progresser et le diffuse. C’est aussi l’idéal que nous défendons.
L’histoire en témoigne : la liberté de penser, la promotion de la raison humaine et de la science ont tourné les projecteurs sur l’obscurité théologique pour en saper les fondements, et se lover aux sources de toute affirmation lucide jusqu’à acquérir une légitimité face aux influences politiques.

Cette conception de l’Université comme lieu de rayonnement de la raison va de pair avec la démocratisation progressive, la liberté d’accès aux études, leur gratuité, la garantie des conditions de vie des étudiants, la disparition des censures idéologiques traditionnelles (politiques et religieuses), ainsi que le lien intime créé entre enseignement et recherche.

En somme, l’Université n’est jamais étrangère à son rôle social, reflet des aspirations de la société, qui ne sont autres que l’émancipation, tant collective qu’individuelle.

Forgé par la raison, le savoir libère, rend autonome. Nous sommes inévitablement conduits à redessiner la silhouette des Lumières qui ont fondé notre société et fixé sa finalité : accroître la liberté, la possibilité pour chaque groupe, chaque individu, d’être autonome, de se gouverner.

Ainsi l’Université est-elle essentielle si et seulement si elle garde ce rôle qui la norme plus légitimement qu’aucun autre.
Elle doit devenir et rester indépendante de toute contrainte extérieure qui l’empêcherait de poursuivre ses fins ; c’est le sens de son histoire.

Dès lors, soumettre l’Université au pragmatisme économique, à une logique extérieure (celle des besoins présents, pressants, immédiats et matériels), c’est aller contre ce sens, c’est faire obstacle à sa fonction essentielle (faire progresser et diffuser le savoir) et à sa finalité première : l’émancipation.

Le pragmatisme économique, loin d’être lavé de toute idéologie, prône une dictature du présent, où la société -ses entités institutionnelles ou individuelles- obéit, docile, aux intérêts immédiats.

En ce sens, il est une nouvelle contrainte idéologique qui pèse sur l’Université.

Après le religieux et le politique, ne laissez pas se mettre en place une censure beaucoup plus douce et sournoise, en apparence juste mais en réalité profondément exclusive, celle de l’utilitarisme économique et de la dictature du présent.

Pour garantir à l’Université la poursuite de son rôle fondamental pour notre société, nous revendiquons comme priorités pour une politique de l’ESR :

- l’accès libre et égal pour toute la population aux études universitaires (gratuité, laïcité, absence de censure …)

- la garantie de bonnes conditions de vie et d’études, des acteurs de l’université (personnels, enseignants-chercheurs, étudiants)

- l’indépendance de son organisation et de son contenu tant par rapport au pouvoir politique et religieux, qu’au pouvoir économique (ce qui implique de la part des investisseurs un engagement désintéressé, ayant pour seul et unique but le savoir et son progrès)

- la garantie de ce qui fait la spécificité de l’Université : le lien entre enseignement et recherche

- l’extension de ce système universitaire à l’ensemble de l’enseignement supérieur, comme institution séparée de tout objectif lucratif et ne pouvant donc s’apparenter à une gestion d’entreprise.

Ces revendications sont les seules garantes d’un idéal universitaire conforme à son sens historique, à son rôle social, à son utilité première, mais non immédiate : libérer les hommes.

Pour vanter les mérites d’un système politique héritier de la Révolution Française, d’une conception du savoir comme fille des Lumières encore faut-il respecter leur principe et leur finalité ; le projet de loi de la ministre de l’ESR les bafoue.

Aussi, l’ambition politique que s’est donnée cette loi est-elle en contradiction avec les principes mêmes de notre République et conduit à la destruction progressive des universités publiques.

En qualité de citoyens mais aussi d’étudiants de philosophie, le message que nous voulons vous adresser est clair : la loi « Fioraso » portée par Madame la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche est une mauvaise loi, qui sape à la base ce qui est déjà laborieusement sauvegardé par l’ensemble des acteurs de l’université, à savoir l’intégrité de l’Université française, et promet de dissoudre tous ses prétendus avantages avant même de les avoir formulé par décret.

Cette intégrité n’est ni vaine ni absurde : c’est elle qui soutient la société française et lui permet, dans ses travers, de porter un regard juste sur elle sans se condamner dans la médiocrité aveugle de la pensée dominante.

C’est elle qui permettra à la civilisation de se connaître avant de périr, elle enfin qui se doit de garder ce cap en dehors des intérêts privés et de corporation dont on voudrait l’accabler comme une prétendue justification. L’université ne deviendra jamais une « arme anti-crise » parce qu’elle doit se maintenir au-dessus de la confusion et de la précipitation qui est aujourd’hui le lot de la société française et de sa politique.

L’université revendique sa parole et la philosophie sa profonde tradition critique.

Nous refusons cette loi et nous vous demandons de faire porter ce refus jusque dans votre conscience et jusque dans vos choix de première importance.

Nous croyons, et nous espérons que vous le croyiez aussi, que ni cette parole ni cette tradition ne peuvent en aucun cas être mises à la porte du hall prestigieux de la décision politique.

S’il est de notre devoir de nous exprimer, il est du vôtre de nous entendre.

Comité pour la défense de l’Université (Jean Moulin - Lyon 3)
Mail pour les contacter : fioraso.lyon3@gmail.com  

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